Par Pierre Vennat
Texte inédit

Récemment, dans le Bulletin d’histoire politique et ailleurs, plusieurs historiens reconnus comme Robert Comeau, Yves Tremblay et Béatrice Richard, pour ne nommer que ceux-là, ont déploré que nos départements d’histoire aient sabré dans l’enseignement de l’histoire militaire, ne remplaçant pas les rares spécialistes de cette discipline qui partaient à la retraite et fournissant peu d’encouragement, d’outils et de possibilités de tutorat aux rares braves encore désireux d’entreprendre une maîtrise ou un doctorat dans cette discipline.

Pourtant, l’intérêt pour l’histoire militaire existe, non seulement parmi les étudiants universitaires, mais chez les plus jeunes et le public en général.

Je lisais cette semaine sur le site Internet de l’École secondaire l’Achigan ce compte-rendu après la visite de deux vétérans du raid de Dieppe de 1942, puis prisonniers de guerre pendant près de trois ans , Paul Dumaine et Maurice Jolicoeur, encore verts, 65 ans après le coup et venus faire part de leur expérience à un groupe de jeunes de 70 ans leurs cadets : « Ce fut un moment où l’émotion était à son maximum et les élèves ont beaucoup apprécié la présence de ces anciens combattant ».

Je pourrais en dire autant des élèves du Mont-Saint-Louis, à Montréal, d’écoles secondaires de Châteauguay, de la région de Québec, et d’ailleurs que j’ai visitées ces dernières années, à la demande des enseignants de ces endroits.

Je me souviens aussi de l’intérêt et des questions pointues posées par les étudiants assistant aux cours de l’historien Carl Pépin, d’abord à l’Université Laval, à Québec puis à l’Université du Québec à Montréal au début des années 2000. Pépin n’était que chargé de cours, sans bureau ni endroit pour faire de la recherche et son cours n’était que facultatif aux deux endroits. Et pourtant, à chaque endroit on trouvait des dizaines d’étudiants intéressés.

Même si aucun n’aurait peut-être choisi de faire son mémoire de maîtrise ou sa thèse de doctorat là-dessus, tous étaient intéressés à en apprendre davantage sur notre histoire militaire pour pouvoir, un jour, ajouter ces connaissances à leur pratique.

Alors pourquoi avoir non seulement coupé les budgets pour l’embauche de professeurs et même les cours d’histoire militaire que donnaient Pépin ou d’autres chargés de cours?

Dernièrement j’ai été embauché par une constituante de l’Université du Troisième Âge, dépendant de l’Université de Sherbrooke, pour développer un cours de 15 heures en raison de trois heures par semaine, cinq semaines d’affilée à des gens âgés de 55 ans et plus qui veulent connaître l’histoire militaire du Québec, de la Nouvelle-France à l’Afghanistan (et l’intervention en Haïti) comprise.

Un programme pilote en éducation permanente que je devrai préparer de toute pièce, mais conçu non à ma suggestion mais à la demande de ces gens qui se sont adressé à moi parce qu’ils veulent en savoir davantage.

Je suis persuadé qu’il y a place pour des initiatives semblables à maints endroits. Des dizaines, sans doute des centaines de gens qui ne demandent pas mieux que d’apprendre cette tranche de notre histoire.

Il s’agit simplement de leur fournir une structure pour se charger du secrétariat et des inscriptions et fournir un local convenable et ensuite dénicher des chargés de cours crédibles, des enseignants du primaire ou du secondaire connaissant le sujet et capable de le vulgariser, des étudiants ou diplômés universitaires en histoire pas nécessairement professeurs à plein temps, je suis certain que le réservoir existe.<

Il s’agit simplement que quelqu’un prenne l’initiative en main.

Et si ça marche, nos universités seront bien obligées d’emboiter le pas et d’encourager la recherche et les études de haut niveau dans cette discipline.

En attendant, place à l’éducation populaire et au cours de vulgarisation à l’intention des gens désireux d’en savoir plus.

Pierre Vennat