Par Sébastien Vincent
La nouvelle collection « Maîtres de Guerre », dirigée par l’historien François Kersaudy et le journaliste Yannis Kadari, met en relief l’influence exercée sur le cours des deux guerres mondiales par le caractère, l’expérience, les initiatives, les intuitions, les forces et les faiblesses de leurs principaux acteurs.
La collection les laisse s’exprimer sur ce qu’étaient leurs desseins et leurs moyens, tout en donnant la parole aux témoins directs de leurs entreprises.
Une riche iconographie et une mise en page dynamique caractérisent cette collection en donnant un bon aperçu de ce qu’étaient les conséquences de leurs décisions et de l’action de leurs exécutants sur le terrain.
À ce jour, la collection publiée chez Perrin compte trois titres: Staline, Patton et Hitler.
Terrible Staline
L’ancien séminariste géorgien Joseph Djougachvili, devenu tour à tour conspirateur, révolutionnaire, apparatchik et despote sanguinaire, n’avait rien a priori d’un homme de guerre.
Depuis les actions séditieuses au Caucase jusqu’aux grandes manoeuvres de la guerre civile, ses incursions dans le domaine militaire ont été généralement calamiteuses, et ses purges des années trente se sont avérées plus dévastatrices pour le commandement des forces armées que n’importe quel conflit dans l’histoire du monde.
D’où vient dès lors que ce « communiste habillé en maréchal » ait pu sortir en grand vainqueur de la Seconde Guerre mondiale? Par un récit accompagné de nombreuses photographies, cartes et illustrations, on mesurera combien la ruse, la propagande et la terreur peuvent suppléer à l’aveuglement diplomatique et à l’amateurisme stratégique.
Le plus récent volume de la collection « Maîtres de Guerre » propose la première biographie centrée sur le rôle de chef de Staline.
Patton: le plus célèbre des généraux américains de la Seconde Guerre mondiale
« On ne gagne pas une guerre en mourant pour sa patrie ; on gagne une guerre en faisant ce qu’il faut pour que ce soit le fils de pute d’en face qui meure pour sa patrie ! » a dit George Patton.
Doté d’un sens inné du commandement et d’une incroyable habileté tactique, George Patton a combattu depuis la Tunisie jusqu’en Allemagne, en passant par la Sicile, la Normandie, la Lorraine et les Ardennes.
Maître de la guerre mécanisée, flanqué de ses Colts à crosse d’ivoire et coiffé de son casque lourd, « grande gueule » et gaffeur impénitent, Patton dit ce qu’il pense et fait ce qu’il dit. C’est l’archétype du héros – c’est le héros.
Pourtant, son visage de guerrier n’est qu’un masque soigneusement étudié, tout comme son allure de justicier, son langage de charretier et ses effroyables accès de colère. Au-delà de ces artifices, soupçonne t’on la fragilité psychologique de ce personnage qui connaîtra de graves épisodes dépressifs, frôlant même le suicide?
L’imagine-t-on dévoré par l’ambition et obsédé par son destin? Ce récit signé par Yannis Kadari est illustré de photos rares qui retracent l’aventure d’une formidable bête de guerre, doublée d’une fabuleuse bête de scène.
Hitler: chef de guerre
Étrange parcours que celui d’un artiste bohème devenu tyran implacable et chef de guerre téméraire. En accédant au pouvoir en 1933, Adolf Hitler a changé le destin de l’Allemagne, mais en déclenchant la Seconde Guerre mondiale, il a changé le destin du monde.
Comment ce caporal de la Grande Guerre et stratège autodidacte a-t-il pu tenir tête pendant cinq longues années à la plus gigantesque coalition militaire jamais assemblée dans l’histoire du monde? Comment s’explique l’extraordinaire emprise sur le peuple allemand de cet orateur exalté à l’équilibre fragile, doté d’une mémoire phénoménale, d’une volonté inébranlable, d’une confiance illimitée en ses intuitions et d’une totale absence de scrupules?
L’angle choisi par François Kersaudy, biographe de Churchill et spécialiste de la Seconde Guerre mondiale, met en lumière le parcours militaire de l’artiste bohème raté devenu tyran implacable et chef de guerre téméraire. En 14 chapitres touffus, mais au style accessible, son Hitler présente un condensé d’histoire militaire auquel il manque manifestement une conclusion digne de ce nom.
L’historien Ian Kershaw, dont les travaux constituent un sommet historiographique inégalé sur le nazisme, soutient dans l’introduction de sa monumentale biographie du Führer (Flammarion, 1998-2000) que « [la dictature hitlérienne] a montré comment une société moderne, avancée, cultivée [a pu] si rapidement sombrer dans la barbarie ». Hitler a été l’épicentre de cette offensive contre les racines mêmes de la civilisation. Pour cela, il importe de poursuivre la réflexion sur l’homme qu’il fut.
Les directeurs de la collection « Maîtres de Guerre »
François Kersaudy, qui a enseigné aux universités d’Oxford et de Paris I, est spécialiste d’histoire diplomatique et militaire. Il parle neuf langues et a écrit entre autres De Gaulle et Churchill ; De Gaulle et Roosevelt ; Hermann Goering, le deuxième homme du IIIe Reich et Churchill, le pouvoir de l’imagination. François Kersaudy a également traduit et commenté les Mémoires de Guerre de Winston Churchill paru chez Tallandier.
Yannis Kadari est journaliste et fondateur du groupe de presse Caraktère, qui publie cinq revues, dont Ligne de Front et Histoire(s) de la Dernière Guerre. Auteur de nombreux articles et dossiers, il est spécialiste de l’histoire de la guerre mécanisée, notamment de la période de la Seconde Guerre mondiale.
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