Le Soleil
Lors de ses rencontres avec le documentariste, Claire Martin raconte que sa famille et elle avaient accueilli à grands coups d’applaudissements les soldats canadiens-français qui revenaient d’Europe par le port de Québec. Un souvenir mémorable pour la romancière qui avait crié : «Bravo Chassé!» pour féliciter le lieutenant-colonel Henri Chassé de la façon dont il avait dirigé ses troupes. C’était la fin de la Première Guerre mondiale. Claire Martin avait cinq ans.
Ce moment a été marquant dans la vie de Mme Martin, mais qu’en est-il pour les autres résidents de Québec? Par devoir de mémoire et par curiosité, Jean-Pierre Dussault des Productions Trait d’union décide de s’intéresser de près à cette époque méconnue des gens de la capitale.
En effet, les documents traitant de la Première Guerre mondiale – principalement écrits par des historiens anglophones – laissent bien peu de place à la part des Canadiens français dans ce conflit mondial, selon l’historien Carl Pépin, qui a participé au documentaire. «Jusqu’en 1995, il n’y avait rien d’écrit sur la nature de la participation des Canadiens français.» Un trou dans l’histoire que Jean-Pierre Dussault souhaitait combler.
Trois ans de travail
Avec l’aide, entre autres, de Mario Munger – qui avait travaillé sur le défunt projet Québec, ville de garnison pour le 400e de la Ville de Québec -, et de plusieurs historiens et militaires, Jean-Pierre Dussault lance le projet Québec s’en-va-t’en guerre. Il a fallu trois ans de recherche et de production pour rassembler et mettre à l’écran les documents d’archives (photos et films) du temps. «Nous avons eu des choix difficiles à faire, a souligné M. Dussault lors de la conférence de presse hier. Il y avait beaucoup de matière.»
Divisée en quatre épisodes de 30 minutes, la série débute par le recrutement des soldats. Les Québécois craignent d’abord de s’enrôler car ils ne veulent pas se faire diriger par des anglophones. À Québec, point de convergence de l’effort de guerre canadien en raison de la position stratégique du port, on crée le 22e Bataillon, qui sera francophone. On bâtit la Base militaire de Valcartier, lieu d’entraînement des soldats. Les installations, construites en seulement trois semaines, sont rudimentaires. De plus, les bottes, les uniformes et les ceinturons sont de conception canadienne, mais mal adaptés aux besoins des hommes.
En tout, plus de 30 000 soldats canadiens (et 7500 chevaux!) partent de Québec à bord de 31 navires pour aller se battre en Europe. Le 22e Bataillon embarque sur le Saxonia en mai 1915, direction l’Angleterre. Quelque 6000 Canadiens français combattent lors de cette guerre. De ce nombre, 1100 ne reviendront pas du front.
Le deuxième épisode, intitulé Le champ de bataille, met l’accent sur les affrontements sanglants, comme la bataille de Courcelette, desquels naissent les héros Tremblay, Chassé, Légaré et Keable. L’épisode 3 montre la mobilisation de la population de Québec en soutien aux troupes canadiennes. Finalement, les combattants sont accueillis en héros dans le dernier épisode et tentent, malgré leurs blessures, de retrouver une vie normale.
La série est agréable à regarder tant par son contenu truffé d’archives que par son contenant rendu vivant grâce à la réalisation énergique et à la musique originale prenante. «Maintenant, nous pourrons marcher dans la rue et dire que nous, Québécois, avons une histoire sur la Première Guerre mondiale», lance fièrement l’historien Carl Pépin.
Québec s’en-va-t’en guerre sera diffusée les mardis 5, 12, 19 et 26 mai, à 19h30 sur les ondes d’Ici Radio-Canada. Vous pouvez en découvrir davantage sur les coulisses de la série et voir des témoignages exclusifs et des images inédites sur le site www.quebecsenvatenguerre.com.
Source : http://www.lapresse.ca/le-soleil/arts-et-spectacles/television-et-radio/201504/27/01-4864919-quebec-sen-va-ten-guerre-la-grande-guerre-a-travers-nos-yeux.php